(Quimper 12 juillet 1876 – Drancy 5 mars 1944)

Artiste à la personnalité chatoyante, aimant à se montrer tout en se cachant, Max Jacob pose au lecteur une énigme ; ses amis Jean Grenier et René-Guy Cadou l’ont ainsi évoqué :

– « Qui n’a pas vu Max Jacob vivant, créant ses rôles, assurant autour de lui la distribution des rôles secondaires, et cela parfois d’une manière géniale, ne connaît pas vraiment Max Jacob. »

– « Tu peux bien essayer de te dissimuler sous ta pèlerine de Rocambole ou de douanier, je vais droit à l’épaisseur, au plein-chêne de ta poitrine (…) Max par les allées du jardin, Max claudicant s’achemine vers la confession. »

Deux manières d’être qui correspondent à deux lieux de vie : Paris et le Loiret. Il y a le côté de Montmartre, avec les amis, peintres, poètes, musiciens : Picasso, Braque, Juan Gris, Apollinaire et le groupe des Six… Max Jacob est l’ami joyeux, extravagant et bohème. Et il y a le côté de Saint-Benoît-Sur-Loire : il vécut, religieusement, humblement, dans la petite ville du Loiret de 1922 à 1928. Puis à nouveau à partir de 1936. Comment concilier cela ? « Rien ne me préparait au coup de foudre qui brûla d’un coup mon passé en septembre 1909 et fit naître en moi un homme nouveau », écrit-il pour évoquer ce qui lui arriva. Révélation ? Illumination ? Qu’elle soit de nature religieuse ou poétique, cette vision est décisive : il sera artiste — poète, peintre et aussi musicien. « J’entends par lyrisme le mot, le vers, le poème issus mélodieusement d’une conflagration de plusieurs impressions ». Paris et Saint-Benoît ne lui font pas oublier la Bretagne, où il revient régulièrement (à Quimper malgré les différends familiaux, à Tréboul…) et, surtout, où il a noué des amitiés avec Jean Grenier, Louis Guilloux, Saint-Pol-Roux entre autres. Ses correspondances, mais aussi les conseils à de jeunes poètes, sont d’ailleurs l’expression de sa poésie autant que les recueils de poèmes.

Dès 1940, la législation antisémite lui interdit de publier et de voyager ; il est spolié de ses droits d’auteur. À partir de juin 1942, il doit porter l’étoile jaune. Arrêté chez lui par la Gestapo le 24 février 1944, conduit à la prison d’Orléans, il est transféré le 28 à Drancy où il décède le 5 mars. Les obsèques solennelles eurent lieu à Saint-Benoît-sur-Loire le 5 mars 1949. Jean Cassou, ami fidèle, écrivain et résistant, évoque dans l’oraison funèbre « l’être prodigieux qu’il fut, l’ami délectable, l’esprit unique, paré de tous les dons, de toutes les fantaisies et de tous les charmes (…) ce mélange d’invention et de rigueur, de pitié et d’ironie, cette lucidité d’un impitoyable artiste… » et termine : « Le nom de Max Jacob restera inscrit en tête de la protestation implacable de l’esprit français, de l’esprit humain contre la brute. »