Un hommage polyphonique rendu à Xavier Grall, décédé il y a 40 ans

Michel Le Bris, Jacques Gamblin, Yvon Le Men, Joseph Ponthus… Vingt-sept voix et plumes célèbrent le poète breton pour le quarantième anniversaire de sa mort.

« Calligrammes et Xavier Grall, c’est une longue histoire qui a commencé avec Solo en 1981 », témoigne Yvan Guillemot, directeur de la maison d’édition qui publie aujourd’hui Ne vivent haut que ceux qui rêvent. Solo a été l’ultime opus du poète, écrivain et journaliste breton, décédé à la fin de cette année-là. Et c’est le premier « Grall » du catalogue de l’éditeur rennais. À l’occasion du quarantième anniversaire de sa disparition, Calligrammes lui rend un hommage singulier. Après son Œuvre poétique, publié début 2021, voici un ouvrage collectif en forme de polyphonie. « Nous avons réussi à mettre ensemble des voix sincères, très distinctes et toujours impliquées ». Vingt-sept au total, en vers ou en prose, réunies par Yvan Guillemot, le poète Yvon Le Men et Bénédicte Guillou, elle-même poétesse : « J’ai écrit aux écrivains que j’aime. On ne s’est interdit personne. J’avais lu Xavier Grall à 20 ans, de façon assez emportée, et ne l’avais pas relu depuis. Je voulais savoir comment réagiraient des auteurs qui le relisent et le découvrent », justifie Bénédicte Guillou. Cette Brestoise d’origine, responsable de l’action culturelle à la médiathèque de Saint-Nazaire, s’assigne un « rôle de passeur ». Elle a voulu, ici, « toucher le grand public » avec une ambition : « Je suis pour dérégionaliser les poètes. Ils habitent un lieu, ils peuvent le chanter mais ils sont de toute l’humanité. » Premier écrivain contacté : le Lorientais Joseph Ponthus, alors au faîte d’une célébrité littéraire aussi fulgurante qu’éphémère, conquise avec son roman À la ligne – Feuillets d’usine (éd. la Table ronde) qui lui a valu éloges et floraison de prix. « Nous lui avons transmis Solo fin janvier 2021, raconte Bénédicte Guillou. Il l’a lu et relu six fois dans la nuit, bouleversé. Il a dit « oui » tout de suite. » Joseph Ponthus est emporté par un cancer le mercredi 24 février 2021. C’est son « dernier grand texte », comme il l’écrit lui-même, d’une tragique et troublante analogie avec la fin de Xavier Grall. 

Ce testament intitulé À l’inconnue qui nous dévore est aussi l’une des trois pépites sonores de ce livre, accessible via un QR code. Le comédien Jacques Gamblin et Yvon Le Men lisent également des textes ou extraits de L’inconnu me dévore et de Solo, tous deux écrits par Xavier Grall. De cette « polyphonie », on retient encore le témoignage d’un proche, l’auteur Marc Pennec, lié au poète par sa rencontre avec « l’aînée des sisters Grall ». Il se rappelle « la musique de la vieille machine à écrire » qui « s’active dans un crépitement d’orage et peut-être de colère ou d’emportement lyrique […]. Mon Dieu, conclut ce fervent lecteur de Kerouac et Rimbaud, à quoi bon créer de grands poètes pour qu’ils meurent si tôt ? »